Mes biens chers Frères,
Notre congrégation vit aujourd'hui les heures sombres de l'occupation de terrain et il est temps comme l'a souligné l'Archevêque de Guy Paris, Monseigneur Christiano di Mikonos de nous reprendre en main.
Déjà, lors du pèlerinage à Plaisir, nombre de nos frères étaient absents. 17 sur 60 moines, c'était peu. Mais que dire alors en ce vendredi saint où seulement 48 personnes avaient fait le déplacement ? C'est une honte ! Certes certains s'étaient excusés dont Frère Marouzet, spécialiste pour vendanger et appelé en province à tirer de la Bénédictine. L'absence de notre archevêque occupé à convertir les peuples asiatiques à sa religion par des miracles, transformant le nucléaire en pétrole, était tout aussi concevable. Mais les douze autres ??? Quels piètres apôtres !
Or comme chacun sait, notre Ordre, les Vieux Dominicains Quasi Séculaires, participe depuis de nombreuses années au débat initié par l'UMP, "La laïcité, et la place du Rugbyman dans notre société". C'est dans ce cadre que nos frères du monastère Des Vieilles Branches, nous avaient invités à débattre, conviant à cette occasion un jeune pasteur Anglican, Anglo-écossais, afin de diriger les débats.
Compte tenu du nombre important de participants, le cloître ne pouvant accueillir tout le monde, le père supérieur, Père Solana, organisa deux offices.
Je fis partie du premier et l'échange fut soutenu. Les prières s'enchainaient et nous nous mîmes à genoux de nombreuses fois. Afin de me faire mesurer la souffrance de la mise en croix du christ, Frère Papykatchu m'enfonça ses crampons sur la main, la transperçant de part en part. Le pasteur, peu habitué à voir un tel engagement et une telle ferveur s'exprimer entre deux ordres composés de moines si âgés, intervenait souvent. Il craignait des débordements et interrompait sans cesse les échanges. Il faut dire que les deux congrégations s'opposaient de façon anarchique et enflammée. Le jeune pasteur qui nous rappelait à l'ordre, nous prénommant 125, n'avait pas perçu l'atmosphère détendue et amicale qui nous unissait à nos frères de Courbevoie. Le premier débat se conclut par deux motions pour le Monastère des vieilles Branches et aucune pour nous.
Le père Solana était hors de lui, reprochant le manque de piété et d'abnégation de certains frères.
La pause fut fraternelle avec nos contradicteurs avec lesquels nous nous mélangions avec plaisir. Trois séminaristes basques, les curés Barquisseau, Coxe et Xabi élevèrent les débats apportant leur touche de spiritualité. Dans les stalles quelques jeunes nonnes novices chantaient à tue-tête accompagnées de quelques laïques de la paroisse.
Le second groupe enchaina les débats. Le père Solana avait quelques espoirs d'emporter la décision tant les ténors étaient nombreux et avaient du coffre pour dominer de leurs chants grégoriens l'incohérence des premiers échanges. Même le frère Lazare Fidelin était présent en pleine possession de ses moyens, un miracle à Cap Breton lui ayant rendu toute sa vélocité.
Mais les Prières de Père Solana ne furent pas exaucées. Bien que les VDQS emportèrent cette seconde cession, le retard pris auparavant ne fut pas comblé. 4 motions à 3, la messe était dite.
Les frères Bienaimé et Guillemin avaient quitté le cloître en cours de match afin d'éviter les fausses notes que Le Jeune Pasteur Anglican leur soufflait. L'énervement était perceptible de leur côté mais rien ne pouvait augurer la tragédie qui allait se dérouler. A la fin des vêpres, à l'heure de la communion, l'envie de distribuer des pains vint au plus pieux d'entre nous, le Frère Noaro. "Ceci est mon corps, livré pour vous !" dit-il en donnant une petite tape humiliante et condescendante au jeune pasteur maladroit. Hélas, cet écart de comportement échappa à beaucoup et nul n'eut le reflexe de le reprendre. Mais le sacrilège était là et le jeune ecclésiastique traumatisé ne tendit pas l'autre joue.
Après les rituelles ablutions, les deux congrégations se retrouvèrent au réfectoire afin de partager le fruit du travail des moines belges, cette boisson rafraîchissante que l'on nomme bière. Le frère Ronan de l'immaculé dans les douches, offrit à l'abbé Tiret de Toulouse, pour ses 50 ans, une icône, sorte d'ex-voto rugbystique qu'il affectionne.
Puis chacun est rentré dans sa cellule, certains restant tout de même pour prier toute la nuit au réfectoire des vieilles Branches.
Hélas, les matines furent douloureuses. Le père supérieur du monastère des Vieilles Branches lançant une missive à Notre Archevêque Christiano di Mikonos, accusant l'ensemble des VDQS de fouler au pied les vertus cardinales de notre religion.
Sans plus d'informations, L'archevêque poussa à nouveau une énorme colère, sonnant les cloches de tout le monde, menaçant d'ex-communion le Frère Noaro. Ce dernier dont la fraternité et la gentillesse font l'unanimité, culpabilisa et prit sur lui, à tort, la responsabilité totale de son acte. Nous apprîmes ainsi que pour expier son pêché à l'encontre du jeune Pasteur Anglo-Ecossais, il avait passé tout le week-end à se flageller la verge avec un chardon en chantant God Save the Queen devant un portrait d'Elisabeth II. Certes, Frère Noaro était réprimandable, mais loin d'être magnanime, l'Archevêque enfonça le clou de celui qui s'était déjà crucifié. En pénitence Monseigneur Christiano di Mikonos lui imposa 100 "Quand reviendra Septembre" et 200 "Petite Marie".
Devant tant de contrition on ne peut rien ajouter si ce n'est de demander pardon à nos Chères Vieilles Branches : qu'ils nous pardonnent comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés, et délivrez nous des balles. Ainsi-Soit-il.
Amen, je vous le dis, la retraite rugbystique n'est pas si simple. A l'heure où bon nombre d'entre nous font carême en vouant un culte déraisonnable à Saint Dukan, n'oubliez pas ces paroles du Prophète St. Michel Dumortier : "Que celui qui n'a jamais pêché, lui verse la première bière !"
Bon Dimanche.