Plus une place handicapé n’était disponible aux abords du stade du parc en ce soir du vendredi 9 septembre. Revenu spécialement du Brésil, notre coach en intelligence collective, Frère Noaro, avait eu l’idée de génie d’organiser la grande finale des jeux para-rugbystiques opposant les VDQS aux Vieux Loups de Franconville. Boris, conchyliculteur du Val d’Oise, avait réuni ses plus beaux spécimens tandis que Manu pouvait compter sur une cinquantaine  de joueurs aux handicaps variés. Moi-même, étant aveugle, je n’ai pas vu le match et ne pourrais vous en faire qu’un sommaire compte-rendu.

Le premier tiers temps fut une débauche de fautes de mains, d’en avant de part et d’autres. Côté VDQS le problème se situait au niveau de la communication, Freddy étant muet et Fabien sourd, les transmissions à Picasso, aveugle, n’étaient pas évidentes même avec un grelot dans le ballon. Côté Franconville l’obésité des avants empêchait leurs petits doigts boudinés de conserver les ballons. Au finish un essai de Fred Noaro sur une percée solitaire, tel Forest Gump, illustration de cette intelligence collective dont il a le secret. Personne ne put l’arrêter. C’est vers minuit trente que la police municipale de Roissy en France nous a appelé pour nous dire qu’il l’avait retrouvé en train de courir avec un Ballon VDQS sur le tarmac de l’Aéroport. Sur le banc de touche Kaspi le Magnifique et Pierre Grenard trépignaient à l’idée de rentrer, Kaspi lâchant toutefois « Ah…ils sont gros en face… ». Mais Pierre l’encouragea : « Mais regarde, y’a Vitali Corléone, ça serait top de faire une troisième ligne avec lui ! » A ces mots, Vitali Corléone se tordit la cheville et sortit. Rien de grave heureusement. Depuis son amputation il a rejoint son pote Toc, lui aussi cul de jatte, à l’hôpital de Garches où ils suivent ensemble une rééducation motrice. Ils se sont aussi inscrits à des cours de tirs couché organisés par Oscar Pistorius, afin de ne plus avoir à justifier auprès de leurs épouses, leurs blessures au retour des matchs.

A la pause Manu fut confronté à de nombreux dilemmes parmi lesquels celui de garder Marou à la mêlée, manchot depuis qu’un photocopieur avait tenté de l’avaler lors d’un test de bac de chargement papier. Heureusement la verve et les injonctions de Thibault pour motiver l’équipe permis de le conserver à ce poste : « Les gros faut que vous me nettoyiez le ballon, faut que ça soit propre, faut que Marou puisse l’attraper avec ses couilles ! ». Mesdames Dayre et Gourdon étaient alors toutes excitées à l’idée de voir le match reprendre.

Allers et venues d’un camp à l’autre, finalement Marou fit une passe avec ses couilles à Thibault qui capta la balle grâce à une aspiration anale libérant ses deux bras pour le raffut, et finit par aplatir dans l’embut. Il fallut deux heures aux médecins pour lui enlever le ballon de l’intestin mais son sourire béat, après cet exploit, faisait plaisir à voir.

Le troisième tiers temps laissait augurer une réaction de la part de Franconville. Manu avait fait rentré l’Anglo-saxon Mark Owen dont les avant-bras sont statufiés depuis une brûlure au troisième degré avec la théière de sa mère, un après midi vers 5 heures. Cet accident aux bras lui permirent néanmoins de traverser la Manche et d’être incorporé chez les VDQS. Exit les bras, ce qu’on nomme en Grande Bretagne Brexit, Mark avait gagné sa place. Hélas, lors de ce match, l’homme ne put toucher du doigt l’apothéose, lâchant en avant trois ballons alors que l’embut lui tendait les…Enfin, la piste était dégagée, quoi ! Son désespoir se lisait sur son visage mais Lapic, le N°5 de Channel 24, vint le soutenir : « T’as jamais pensé reprendre le foot ? ». Quel psychologue celui-là !

Et c’est là qu’il faut que je m’attarde sur quelqu’un. La Bûche qui me harcèle depuis dix jours pour lire ce CR , n’est pas un handicapé comme les autres. Il souffre depuis un an d’une Ducanite aigüe, maladie qui ronge les graisses et provoque des troubles comportementaux de type « Gilles de la Tourette » très utiles pour les troisièmes mi-temps mais terriblement gênante au travail. Cette maladie orpheline est néanmoins sexuellement transmissible comme le prouve la contamination de Petit Jan. Amitiés de troisièmes lignes ou intimité des amateurs de Motos ? De Harleys ? Les épidémiologistes sont en alerte et ont placé Fred Lavergne et Olivier Estrade sous surveillance tandis que Papykachu s’est abonné à moto magazine. Toujours est-il que nos deux anorexiques eurent fort à faire avec leurs vis-à-vis notamment la Bûche qui tenta un départ face à trois mastards et fut projeté en arrière de 3 mètres. Peine perdue, il finit par marquer le troisième et dernier essai.

Cette première victoire de la saison rendait joyeuse toute l’équipe et plus particulièrement notre bon président Dupraz, que dis-je ?, notre “Bon Coin“ tout court. Un VTT, une table d’abdos, un rameur, un jeu de poids, un sac de boxe, un sport élec, entre l’Abbé Pierre et Décathlon, Christian avait lancé durant l’été son nouveau site internet “mafemmenenveutplus.com“. Notre Mark Zukerberg VDQS dépensa tous ses bénéfices en pitchers pour noyer sa tristesse de voir sa salle de sport transformée en nurserie.

Quelle ne fut pas notre bonheur de retrouver Chubaka au Club House. Le tétraplégique de San Francisco toujours à la pointe de l’innovation se déplaçait avec un exosquelette particulièrement performant pour le nourrir et surtout l’hydrater. Est-ce  un déréglage ou une programmation défectueuse, il enchaîna 10 bières en un quart d’heures.

A l’applaudimètre Pierre Grenard dépassa de peu Mark Owen. Il faut dire que les Séniors étaient si heureux qu’il soit enfin VDQS que le soutien fut total. Moule pour Franconville, la soirée débuta dans la bonne humeur. Un éducateur des vieux loups voulu enfin montrer aux hôtes les prouesses éducatives du club sur les trisomiques de l’équipe. « Les enfants, vous montrez aux VDQS votre chanson ! ». Un petit groupe se déshabilla pour entamer un Haka, certes approximatif mais terriblement touchant.

Bref , 3-0 et une bonne soirée : la saison s’annonce d’un bon millésime.