Que s’est-il passé dans la nuit du 27 avril 2018 dans ce petit village tranquille de l’Ovalie profonde,  Montelesson sur oreillette ? C’est la question qui est sur toutes lèvres lorsque le journal du lendemain titra : « Vendredi 13 chez les VDQS : 4 victimes, 12 impacts de balles ».

Le drame s’était déroulé dans un lieu isolé, au bord du fleuve dont seul quelques couples échangistes et un petit groupe d’initiés aux agapes vespérales connaissaient l’existence. L’endroit était gardé par un vieux garde champêtre claudiquant aux côtes fêlées, à la barbe drue et au regard pervers qui distillait de la bière clandestinement. Son nom : Ludo. A ses heures perdues, l’ermite organisait des combats clandestins, les Ultimate Prostatic challenge,  où de nombreux parieurs avinés venaient dépenser leurs APL. « D’habitude les choses se passaient bien », confia  un témoin du drame, un certain Bastagro, un handicapé venu parier sa prime cotorep sur la victoire des VDQS . Mais là ce fut l’horreur.

Lorsque les gendarmes arrivèrent sur les lieux du massacre vers 22h00, alertés par un jeune gamin paniqué, Eloi, qui criait « Ils ont tué la cheville de mon Tonton et ils veulent épiler mon papa », ils découvrirent avec effroi les dégâts. Mais que c’était-il réellement passé ? Aussitôt mis en Garde à vue, Ludo et son complice organisateur de cette boucherie, un certain Manu Solacrier, révélèrent aux enquêteurs des détails troublants.

Dès le départ, la rencontre était bien mal engagée comme l’avait souligné un petit homme casqué comme un Black Block, un certain Estrade : «  ça va être compliqué, aujourd’hui » avait-il lâché. 18 lutteurs des Vieux crampons avaient répondu présent tandis que les VDQS boys n’étaient que 13. Plus tard les gendarmes tombèrent sur des fichiers électroniques secrets, les fameux Kaxuleaks, révélés par Edouard Doodle, qui confirmèrent leurs déclarations. En fouillant Manu Solacrier, l’adjudant Widow trouva également un papier froissé et gribouillé sur lequel étaient notés les noms des combattants avec des chiffres illisibles, des flèches dans tous les sens, un plan des lieux et un système de codage inviolable, que le malfrat lui-même ne parvint pas à relire. Vacances scolaires ou viaduc de mai, les effectifs ne suffisant pas, les deux organisateurs décidèrent de jouer ce combat à 13 contre 13, sans n°8 et sans arrière. Manu perdit pied, ses plans étant ruinés. Il désigna Romain comme ouvreur : « Vitali tu mettras de la vitalité » l’encouragea-t-il . En voyant Guillaume Renaut il hésita et  par moyen mnémotechnique retrouva sa composition initiale  : « Twingo, R5, Dauphine, 4L….Renaut à l’aile ! ». Freddy qui porte le même nom, cru que l’injonction fut pour lui. Mais non. Notre couteau suisse des lignes arrières fut posté en numéro 9. Après Idéal du Gazon et Gauthier, notre 9 d’occasion, Freddy devenait notre Elissalde en Solde : « Elissolde ». Tic et Fabien assurèrent au centre. La mêlée fut assurée par Papykaxu, Estrade et Charly en première ligne, Blanche Neige et Miguel en seconde ligne, Jérôme et Benji en troisième : bref le cercle des poètes disparus, des fichiers « S » en puissance.

Les enquêteurs ne tardèrent pas à recomposer la chronologie précise des faits minute par minute.

20h28 : Coup d’envoi des VDQS magistralement droppé par Rénato.

20h29 : récupération des Vieux Crampons, débordement, échappée …essai.

20h33 : mêlée pour Montesson dans nos 40, surnombre et essai.

20h35 : la hargne monte chez les VDQS et après un ruck, Charles saisit le ballon, transperce au ras et court sur 35 mètres pour marquer entre les poteaux

20h42 : toujours fougueux dans les 22 adverses, les VDQS enchainent les pick and go conclus par un essai de Blanche Neige.

20h47 : Débordement aile gauche et essai de 60 m de Montesson.

20h49 : idem.

 

« Et vous n’avez rien pu faire ? » interrogea l’adjudant Widow. Manu Solacrier releva la tête : « On y croyait encore, 4 à 2 c’était jouable, mais j’ai essayé de leur faire comprendre la défense inversée et ils ne comprenaient pas ! »

 

20h54 : Dès le coup d’envoi, les Vieux Crampons perforèrent la défense VDQS marquant un essai par ce petit espace.

20h57 : Toujours un problème à l’aile. Essai de 80 m du n°9  Montessonais malgré un placement stratégique de Papykaxu qui n’avait pas eu la force de bouger depuis l’action précédente.

20h58 : C’est au tour de leur n°7 de jouir de notre embut. Hélas sur cette action notre « Pénétrator », Miguel, tomba au chant d’honneur ; oui au CHANT, car maintenant sa voix est plus grave. Le médecin légiste diagnostiquera plus tard une fracture du cartilage de la gorge, un crime sournois par étouffement.

21h02 : Deuxième mort suspecte. La victime : Olivier Estrade, le fameux Black Block de Vanves. Là encore l’autopsie révéla le sectionnement du scrutum avec un objet contondant, un traumatisme ischio-testiculaire, en langage profane : une grosse douleur aux couilles. Le corps du pilier abandonné dans un fossé, un tueur VDQS à l’instinct basique  le remplaça : La Pic.

21h03 : Essai du n°15 de Montesson….de 50m.

21h06 : Après une splendide ouverture de Rénato, Etienne nous gratifia d’une échappée et en équilibre, au ras de la touche, et tout en se prenant deux défenseurs sur le paletot il passa le ballon à Freddy pour un splendide Essai.

21h07 : Troisième meurtre : La cheville de Popot. Mais est-ce un meurtre ou un suicide ? Son agonie sembla suspecte car la victime murmurait « J’en ai marre, j’arrête, je me réserve pour Versailles».

21h10 : Rebelote : débordement et essai de Montesson.

 

L’adjudant Widow resta un instant prostré tant l’horreur du carnage l’impressionnait. « et vous n’avez rien fait pour arrêter cette tuerie ? » demanda-t-il à Ludo. « On avait un public chaud bouillant et accessoirement imbibé. Ils chambraient à tour de bras les joueurs et prenaient un réel plaisir…alors…On a prêté des joueurs aux VDQS pour continuer le spectacle » Déclara le Bookmaker. « On a quand même limité la casse : on a limité le 3 tiers temps à 15 minutes » se justifia Manu.

 

21h18 : Essai de Montesson et quatrième cadavre. En tentant d’arrêter l’action adverse Benji se fit amputer la jambe gauche. Hémorragie interne…

21h25 : C’est dans un sursaut d’orgueil que les VDQS marquèrent à nouveau…Essai de JUJU (Vieux crampons / VDQS).

21h26 : Réponse du berger à la CFDT : essai de Montesson.

21h29 : Galvanisé par les cris hystériques de Julie son épouse, Blanche Neige nous gratifia d’un essai en force sur les poteaux adverses.

21h31 : Nouvelle percée, nouveau débordement et essai de Montesson

21h33 : Essai en contre de Montesson.

 

12 à 5 : score final et 4 victimes.

 

L’adjudant voulu en savoir plus « Et après, qu’est-ce que vous avez fait ? » « Je crois que j’ai remis la radio » Dit Manu. « Chacun fait ce qui lui plaît » ajouta Ludo. Enfin ce qu’il peut. En panne de restau, les rescapés se retrouvèrent au club house pour un buffet campagnard gratuit.

Déjà les VDQS tentèrent de se créer un alibi, ou une version officielle pour la Police : « 12-5…, on a qu’à dire qu’on a perdu Un essai contre 4 pénalités ! » proposa Jérôme. « Je te rappelle que les coups de pieds sont interdits ! » le moucha Elissolde. C’est alors que Renato qui revendiquait un meilleur coup de pied que Fred Noaro fut saisit par un malaise.  Des plaques rouges envahirent son corps, des marques violettes ressemblant à la tache de vin de Gorbatchev et ici et là aux varices de Christine Boutin. Empoisonnement par les Russes ou vengeance personnelle ? Selon des sources proches de l’enquête, le crime ne semblait pas en relation avec l’assassinat des autres victimes. Après avoir suspecté Fred, jaloux des prouesses pédestres de son remplaçant, les enquêteurs soupçonnèrent ensuite sont ex-conjoint, un certain Albin de Soulac, que Rénato avait plaqué récemment avec son yorkshire nommé Zémour, devant le Castorama d’Arcachon : au cœur du différend, une sombre histoire de choix de voilage pour leur lit à baldaquin. C’est à 23h00 que le préfet de police ordonna l’évacuation du Club house et que vers 2h00 du matin les chiens renifleurs retrouvèrent Papykaxu toujours en panne sur le terrain, les batteries usées par 55 minutes de jeu. 

 

Faute de traces ADN et de preuves concrètes, le juge d’instruction, le Juge Sixiou, conclut l’affaire par un non-lieu. C’était un accident : le terrain était dur, les corps fatigués, l’arbitrage impeccable, le jeu fair play. De plus les Vieux Crampons surent par leur accueil, leur joie de déconner sur la touche, d’afficher du sérieux en match et de l’autodérision lors de fautes, montrer un esprit vétéran comme on l’adore. De leur côté les 13 salopards VDQS ont montré  jusqu’à la fin de l’opiniâtreté et du courage.  En somme, cette rencontre fut une victoire, celle du rugby amateur et de ses valeurs, et ça c’est pas un crime !