Magnifiquement interprétée dans l'entre deux guerres par la grande Damia (1892-1978), tragédienne de talent. A la VDQS, nous la chantons déguisés en Gégène, prototype même de l'apache des fortifs : foulard rouge et casquette de voleur de poules. Cela ne nous empêche pas de finir la larme à l'œil, devant le malheur qui accable cette pauvre fille.

Comme elle n'avait qu'seize ans à peine

Elle sentit battre son cœur.
Un soir avec le môme Gégène
La pauvrette avait cru au bonheur.
C'était l'soir d'la fête nationale
Où c'que la bombe pète en l'air.
Elle sentit comme un grand coup d'flamme
Un frisson qui pénétrait sa chair.

Par devant, par derrière,
Tristement comme toujours,
Sans chichi, sans manière,
Elle a connu l'amour.
Les oiseaux dans les branches
En les voyant s'aimer
Entonnèrent la romance du 14 juillet.

Mais quand refleurit l'aubépine
Aux premiers jours du printemps
Fallait voir la pauvre gamine
Mettre au monde un tout p'tit enfant.
Mais Gégène qui est l'mec à la cool,
Lui dit : « Ton gosse moi j'm'en fous.
J'te l'ai mis, maintenant j'me les roule.
A ta place je lui tordrais le cou. »

Par devant, par derrière,
Tristement comme toujours,
Fallait voir la pauv'mère
Et son gosse de huit jours.
En fermant les paupières
Elle lui tordit l'kiki
Et dans l'trou des ouatères
Elle jeta son petit.

Mise au banc de la cour d'Asssises
Comme à celui d'la société,
Elle fût traitée de fille soumise,
Le lend'main du 14 Juillet.
Entendant le verdict atroce
Qui la condamne au bagne pour vingt ans,
Elle pensait à son pauvre gosse
Qu'elle ne reverrait plus maintenant.

Par devant, par derrière,
Tristement comme toujours,
Elle est morte la pauv'mère
A Cayenne un beau jour.
Morte avec l'espérance
De revoir son petit
Dans la fosse d'aisance
Là où c'qu'elle l'avait mis
Dans la fosse d'aisance
Là où c'qu'elle l'avait mis.